dimanche 27 septembre 2020

Yasmina Khadra "Le sel de tous les oublis."



 

J'ai découvert cet auteur il y a quelques années, je le lis dès qu'il publie, rarement déçue, une fois peut-être. Le premier livre lu "Les hirondelles de Kaboul." j'avais beaucoup aimé.

"Le sel de tous les oublis." vient de paraître. 

L'Algérie après l'indépendance, la violence règne dans ce pays, les hommes qui sont au pouvoir n'ont pas rétabli la paix et les années 1990 seront celles qui verront une haine se déchaîner entre algériens. Nous faisons la connaissance d'Adem Naït-Gacem, instituteur dans un petit village, dans la région de Blida. Il rentre chez lui, son regard se porte sur une petite valise en carton, il ne comprend pas mais Dalal sa femme luit donnera des explications, elle part, elle en aime un autre.

Séisme dans la vie de celui qui pensait ne jamais connaître l'abandon, plus rien ne sera comme avant, il a honte et décide de tout quitter, son travail, son village, son errance commence.

« Sèche la mer et marche, lui intime le vieillard. Ne t’arrête surtout pas/Et confie ce que tu cherches/À la foulée de tes pas. »

Il rencontrera toutes sortes de personnages, ils lui voudront du bien mais il n'acceptera jamais une main qui se tend, il se mure dans le silence, boit beaucoup, une tristesse infinie l'habite, il recherche quoi? Des hommes veulent le consoler, il refuse.

Une femme, celle qu'il ne faut surtout pas, lui fera croire qu'il est encore vivant.

Il y a de tout dans ce roman, la trahison, la sagesse de ceux qui veulent le sauver, la violence toujours présente, le désir, la philosophie de Mika, le nain protecteur, j'ai beaucoup aimé Mika. L'histoire de l'Algérie se mêle à la fiction. Ce qui est rarissime, Yasmina Khadra ose décrire des scènes un peu osées.

Yasmina Khadra est un véritable conteur, vous lisez, lisez pour connaître la suite. J'ai d'autant plus aimé ce roman puisque je suis née dans ce pays, j'ai tant adoré ce pays que nous avons quitté en 1962, à l'indépendance, j'avais vingt ans. J'ai reconnu les paysages, j'ai compris la honte d'Adem, Dalal était bien courageuse en quittant un mari qu'elle n'aimait plus, un pays où un écart de conduite est sévèrement puni.

"Je l'ignore. Il est des choses qui arrivent et qui nous dépassent" "Tu ne peux pas savoir combien je regrette le mal que je te fais." Mais elle part et il s'effondre.

Je ne dois pas terminer cette gazette sans dire que j'ai trouvé Adem antipathique, c'est peut-être ce qui a fait fuir Dalal?

Lisez ce roman, il devrait vous plaire.

Bye  MClaire.



vendredi 18 septembre 2020

Anne Pauly "Avant que j'oublie."


 

Une copine scrabbleuse me recommandait ce livre "Il faut que tu le lises." J'ai obéi, nous avons souvent les mêmes goûts de lecture.

Ce livre est émouvant, intense d'émotion, vous pouvez rire, sourire et pleurer. L'auteure s'appelle Anne, le personnage principal du livre aussi.

C'est l'histoire d'une famille pas ordinaire, la mère se réfugie dans la religion, elle meurt, le père est brutal, alcoolique mais il sait être tendre, sensible, un mystère. Le frère est silencieux, emmuré dans sa colère. Anne observe, n'a pas la langue dans sa poche et n'arrive pas à détester ce père qui est tout de même un peu cinglé.

C'est l'histoire d'une vie avant la mort de celui qui a vécu dans une maison délabrée au milieu d'un désordre invraisemblable, cette maison située à Carrières-sous-Poissy, il faudra la vider. Se souvenir des mauvais moments et des bons, il y avait des bons moments, des moments où l'homme ne souffrait pas, où il avait balancé la prothèse de sa jambe dans un coin, ou ceux partagés avec sa fille qui le savonnait, le rinçait, le séchait, frictionnait ce grand dos voûté, le crémait, lui tondait les cheveux, il roulait jusqu'à un miroir et disait "Merci ma douce, c'est très bien, me voilà tout propre, tout neuf."

Il y a des scènes vraiment très drôles dans les pires moments, celui où il faudra choisir le cercueil, le père sera enterré pas incinéré "Le pin, ça faisait cagette, barbecue,fin de marché..En plus avec une carcasse pareille, il allait falloir du solide.." les obsèques dans cette église pleine, le prêtre qui se trompe de prénom, qui s'endort. Nous attrapons souvent un fou-rire nerveux pendant des obsèques.

Anne se réconciliera avec ce père énigmatique, le lien se créera, ce sera l'apaisement tout en sachant que perdre ses parents fait de nous des orphelins jusqu'à la fin de notre vie.

C'est une histoire entre un père et sa fille, une fille qui videra la maison, ce moment si particulier où Anne a accès au secret du père. La lettre de Juliette est magnifique. Nous avons le droit de pleurer. Le moment où il faut fourrer dans des sacs poubelles tout ce qui a fait une vie.

Anne a une fiancée qui la soutient.

J'ai tout aimé, vous pouvez lire ce bouquin très vite 138 pages ou choisir de lire lentement ce condensé d'émotion. Anne Pauly a une écriture très particulière, son premier livre.


Bye MClaire.




jeudi 10 septembre 2020

"Yoga" Emmanuel Carrère.



 

Difficile d'écrire une gazette sur un livre qui fait tant parler de lui, toutes les critiques sont unanimes, ce roman, mais est-ce un roman?, est le meilleur bouquin d'Emmanuel Carrère.

J'en ai lu quelques uns de cet auteur, il écrit si bien, j'ai acheté "Yoga" dès sa sortie, je n'ai pas été déçue, j'ai beaucoup, beaucoup aimé.

Ce livre est captivant, j'ai trouvé les 100 premières pages assez ardues, il faut s'accrocher, la méditation ce n'est pas trop mon truc, E.Carrère se rend dans un centre réputé, il prend le chemin du Morvan pour 10 jours de méditation, pas de téléphone, pas de contact avec les autres, ils ne se regardent pas, ne se parlent pas, sauf au bout de quelques jours où il se permet de demander à un participant à quoi il pensait, l'autre lui répond "Aux nichons, aux nichons." J'ai ri.

J'ai aussi appris le nom de ces mouvements qui agitent notre mental et qu'il faut chasser "les vrittis" le yoga aide à les raréfier. 

Il devra interrompre son stage au bout de quelques jours, il se passe quelque chose d'horrible à Paris, l'attentat de Charlie Hebdo en 2015, son ami Bernard Maris a été tué. A partir de cet événement sa vie dérape, lui qui se pensait à l'abri des turbulences va connaître le pire, dépression, séjour en hôpital psychiatrique, pulsion suicidaire, jusqu'à la découverte de son mal, la bipolarité, le lithium le sauvera.

Tout au long du livre nous le suivons dans sa quête du "bonheur", il fera un séjour au milieu des migrants sur une île grecque, quatre jeunes migrants seront ses compagnons, des pages émouvantes.

 Il se décrit sans concession, vrai, ne cache pas ses addictions, un homme qui se cherche.

Je n'ai pas trouvé ce livre noir, au contraire, l'écriture est belle, ce livre est lumineux, il nous fait prendre conscience de notre fragilité ou de notre chance d'être des êtres forts qui aimons la vie, je n'ai pas lâché le livre, regrettant de tourner la dernière page. Je vous le conseille.


Bye MClaire.