vendredi 3 octobre 2014



C'est le troisième bouquin de cet auteur que je lis. J'avais aimé "La liste de mes envies", aimé un peu plus parce que l'écriture avait pris de l'assurance et que l'histoire me plaisait "La première chose qu'on regarde", je n'ai donc pas hésité une seconde à lire ce troisième livre  Trois romans écrits en trois ans, pas mal.

Autant le dire tout de suite, je suis très partagée, j'ai aimé, je n'ai pas aimé...et pourtant je l'ai lu presque d'une traite, alors que j'avais abandonné deux livres avant celui-là. J'abandonne si je m'ennuie et c'est assez rare, là je ne me suis pas ennuyée, pas une seconde, mais l'histoire est tellement noire, triste, nous pouvons être désorientés. Je cherche les raisons, la première à mon avis est que j'ai encore en tête le livre de Reinhart "L'amour et les forêts'", un roman noir magnifique et le livre de Delacourt ne supporte pas la comparaison 
J'ai beaucoup aimé à partir de la deuxième partie, celle qui est plus lumineuse, la rédemption d'un homme sous le soleil du Mexique et le cheminement du pardon d'une fille envers son père, là je l'avoue c'est vraiment superbe.

L'histoire :

C'est l'histoire d'Antoine, 38 ans, il travaille dans les assurances, son boulot: traquer les fraudes, il est expert
Antoine traîne avec lui une immense tristesse, le mal d'amour, sa mère est partie vivre sa vie en le laissant seul avec un père un peu lâche, sans envergure et Anne sa petite soeur qui vient de perdre sa jumelle Anna, à 7 ans celle-ci ne s'est pas réveillée. Anne n'arrivera plus à prononcer une phrase complète, un mot sur deux, un langage mutilé, amputé. Antoine liera des liens avec cette petite soeur qui ne s'occupait jamais de lui puisqu'elle vivait avec son double, ils seront deux pour essayer de se reconstruire dans une famille qui vient d'exploser et un père qui n'a jamais eu un geste de tendresse, ça ne se faisait pas, Antoine est docile, impuissant, il ne se rebelle pas comme son père à qui il ne voulait surtout pas ressembler.
La lecture du début de ce livre est pesante, toutes les misères du monde sont rassemblées, le chômage, le cancer, les enfants délaissés, le départ d'un des parents, tous les maux de notre société, dans le livre c'est même un peu trop.
Antoine rencontre Nathalie, ils s'aiment trop vite, trop passionnément, Joséphine naît et Nathalie prend un amant, elle revient, Léon naît et finalement elle repart. Antoine est de nouveau abandonné.
Il perd son travail accusé d'avoir voulu favoriser une assurée.

Il y a de quoi péter les plombs et c'est ce qui arrive. Le pire, l'irréparable.

La deuxième partie est beaucoup plus lumineuse, Antoine part s'installer au Mexique, près de Puerta-Vallarta, il devient homme de ménage dans un hôtel, le "Desconocido" l'inconnu. Il rencontrera un enfant dans une rue qui lui demandera de jouer au foot avec lui, puis Matilda la "soeur" du gamin, supposée être sa soeur, l'amour naîtra doucement, ils ne sont pas pressés "Notre famille naît dans le silence. Dans la grâce. Dans la paix enfin".

La troisième partie est bouleversante, racontée par Joséphine la fille d'Antoine. Le pardon sera au rendez-vous au bord d'une plage mexicaine. J'ai pleuré évidemment.

Il faut se blinder avant de commencer à lire, rendre étanche tous nos sentiments si nous ne voulons pas nous laisser submerger par l'émotion, je n'ai pas pu le faire et c'est sans doute la raison pour laquelle le début de ce livre m'a paru pesant, si sombre.
Ce petit garçon je l'ai aimé et j'ai détesté ses parents incapables de dire "Je t'aime", cette absence d'amour est insupportable. J'ai aimé cet enfant et j'ai moins aimé l'adulte qu'il est devenu, lâche comme son père mais toujours à la recherche de sa mère, il la retrouve mais cette rencontre ne sera pas salvatrice, au contraire. Il ne sait pas se révolter et ça les femmes n'aiment pas, elles partent. C'est très difficile d'être un gentil dans notre société, il vaut mieux être un peu voyou, lui ne sait pas, lui aurait juste voulu que son père réponde à la question " Comment se forme la pluie" et son père n'a pas répondu. Lui aurait juste voulu que sa mère ne réponde pas "A quoi ça sert" lorsqu'il a demandé si elle l'aimait. 

"Ce n’est pas que je n’ai pas voulu de toi, disait-elle ; je n’ai pas voulu de moi. Je ne comprenais pas. Elle a essayé de m’expliquer : elle ne s’était pas rêvée en parfaite petite mère de famille. Ça ne l’intéressait pas, c’est tout. Mais moi ? avais-je demandé. Moi, tu m’aimes, maman ? Tu m’aimes ? Elle m’a répondu : sans doute. Sans doute, mais à quoi ça sert ? ».

Il y a aussi l'écriture bien particulière, des phrases courtes, un style un peu hachuré. Au début de chaque chapitre dans la première partie il y a un prix, le prix d'une vie, le prix d'un geste, le prix d'un objet, notre société de consommation.

Pour une raison plus personnelle, cela m'a fait plaisir de relire les descriptions de la région de Puerta-Vallarta, nous connaissons, nous y sommes allés deux fois, pourtant c'est là que nous avons failli perdre la vie dans un tremblement de terre, mais oublions et essayons de nous souvenir que des beaux moments, des paysages magnifiques, de l'océan qui peut être meurtrier, les vagues sont puissantes on peut très vite se retrouver dans un tambour de machine à laver. La région de Puerta-Vallarta est aussi évocatrice de films "La nuit de l'iguane" par exemple..

Voilà mes impressions, à vous de juger, je suis sortie un peu secouée de ce bouquin mais vous? J'allais oublier j'ai aimé la petite phrase d'introduction d'Henri Calet "Ne me secouez pas, je suis plein de larmes".

 Bye MClaire.


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