Nous voilà installés pour au moins trois semaines à Argelès, le wifi marche bien, je peux m'atteler à écrire une gazette.
J'ai lu cette semaine, j'ai fini un petit bouquin sans importance et j'ai commencé et fini "Monsieur le Commandant" de Romain Slocombe. Je n'ai pas lâché ce livre passionnant, il fallait que je le termine. J'ai refermé ce livre doucement, je n'arrivais pas à m'en détacher, j'étais dérangée, captivée, plein de sentiments m'agitaient, je me posais LA QUESTION :
"Quelle attitude aurait été la mienne à cette époque ?" Une chose est certaine, je n'aurais jamais collaborée, mais est-ce que j'aurais résistée? Est-ce que j'aurais été assez courageuse pour aider ceux qui fuyaient les nazis? Je me serais sans doute fondue dans la masse de ceux qui continuaient à vivre ou à essayer de vivre bon gré, mal gré, avec l'occupant qu'ils haïssaient. On ne peut jamais savoir avant d'être confronté à la situation.
J'ai souvent fait le parallèle avec la période actuelle, la haine de l'autre, l'étranger, les sentiments de toujours qui agitent certains d'entre nous, les discours que nous entendons de plus en plus souvent, ceux qui dénoncent un sans-papier, il y en a, J'ai fini par presque oublier, mais je me souviens encore de notre arrivée en France après l'Algérie, les mots qui blessent, les ricanements de ceux qui se moquaient de notre accent que j'essayais de perdre pour qu'on m'oublie et pourtant j'étais française. J'ai fini par perdre l'accent pied-noir, mais j'ai pris celui de Christian, une légère pointe d'accent du midi. On ne sait plus d'où je viens, sauf qu'en vieillissant je n'hésite plus à dire que je suis pied-noir, pourquoi renier ce qui a été ma jeunesse? Il y a longtemps que le désir de plaire au plus grand nombre m'a quittée.
Il y a aussi l'Allemagne, puissante, qui veut gouverner l' Europe, Paul-Jean Husson, le personnage principal du livre admire cette Allemagne, Hitler qui mettra enfin de l'ordre dans cette France vieillissante. "Le journaliste Gustave Hervé, ardent admirateur d'Hitler proposait aux dirigeants du parti Nazi une révision du traité de Versailles, il écrivait "L'heure du Socialisme National ne saurait tarder pour la France. Quand elle sonnera, l'heure de la réconciliation franco-allemande sera venue." L'académicien approuvait ce qui était écrit, il était convaincu par ces thèses.
Ce livre est une longue lettre écrite à un Commandant nazi par un académicien, écrivain, pétainiste, catholique fervent. Un style épistolaire qui fait tout l'attrait du livre. J'ai fini par me demander si l'histoire était vraie ou inventée. il y a beaucoup de références aux personnages de l'époque, des écrivains qui collaboraient avec l'occupant, de rappels historiques.
C'est l'histoire d'un homme intelligent, érudit, qui habite en Normandie, deux enfants, une fille adorée, un fils qui ne le satisfait pas tout à fait, violoniste et qui un jour juste avant la déclaration de la guerre présente une allemande à ses parents, mais en cachant le plus important, elle est juive, religion que les parents très pratiquants n'admettraient pas.
La guerre déclarée le fils prend le chemin de la résistance en laissant sa femme et sa petite-fille à Paris, sans deviner que son père est tombé très amoureux de sa belle-fille allemande et juive, lui qui vomit la race juive. Il a pourtant un doute sur les origines de celle-ci et fait mener une enquête par un détective. Il sait, mais son amour qui devient obsessionnelle est le plus fort. Pour la voir, il fait abstraction de sa haine des juifs et s'occupe avec attention d'elle et de sa petite fille. Paul-Jean Husson personnage plein de zones d'ombres, l'amour et la haine coexistent chez lui, il devient pourtant journaliste du quotidien local en écrivant des articles qui dénoncent les juifs d'une façon très violente. Un jour arrive ce qui n'aurait jamais dû se passer, il couche avec sa belle-fille dans un moment d'égarement, elle fuit, horrifiée par ce qui vient d'arriver, mais elle est enceinte de lui. Pour lui, la seule issue est de la dénoncer. Je vous laisse lire la suite, parce que ce livre doit absolument être lu.
Comment peut-on haïr autant? Comment les autorités françaises de l'époque ont-elles pu sacrifier des femmes, des enfants, des hommes au nom d'une idéologie pétainiste.
Lecteur d'une lettre, nous avons l'impression d'être voyeur, un peu complice, c'est sans doute cela qui dérange et qui laisse un sentiment de culpabilité. "Si j'avais vécu à cette époque, j'aurais fait quoi?"
Ce livre n'est pas en poche.
J'ai un Douglas Kennedy à lire et un Anna Gavalda. Du bon temps à prendre sur mon transat. il faudrait aussi que je lise "mes mots en poche", ce serait raisonnable.
Je n'ai que deux dessins à vous proposer, pas eu le temps d'en rechercher d'autres, ce sera pour la prochaine fois.
J'espère que l'essence aura encore baissée lorsque nous repartirons chez nous, avec notre caravane.
La pub à la ttélé. Vous en pensez quoi? Perso, je m'en fiche, je me couche toujours très tard. Bye MClaire.