dimanche 6 juillet 2014

COMBIEN ? De Douglas Kennedy



Du tourisme au pays de l'argent ? Non, ce n'est pas pour moi. Je n'aime pas et je ne comprends pas tous les termes qui désignent le profit, la bourse, les obligations, le monde de la finance, tout ça est du chinois, j'aurais fait une piètre banquière, j'aurais dit à mes clients "Profitez de la vie avec votre argent, ne faites pas d'insomnie parce que vous cherchez les meilleurs placements, la vie est courte et au bout n'ayez pas de regrets". Les profits de la banque auraient été en baisse, j'aurais été licenciée et je me serais reconvertie dans une agence de voyages, mon discours aurait été beaucoup mieux perçu.
J'ai pourtant fait du tourisme avec D.Kennedy au pays de l'argent, avec plaisir. Un littéraire qui m'explique l'argent, ça me va.



Douglas kennedy a écrit ce livre il y a plus de vingt ans, il est réédité chez Pocket. Ce livre n'a pas pris une ride, il est toujours d'actualité. Je soupçonne Kennedy d'être un grand malin, je trouve qu'il était un peu en mal d'inspiration dans ses deux derniers livres, moins passionnants, il ressort des récits et lorsqu'il écrit des récits il sait être passionnant.
J'avais beaucoup aimé "Au-delà des pyramides" à lire absolument, "Au pays de Dieu", je n'avais pas lu "Combien ?" et j'ai aimé ce livre écrit comme un roman mais qui traite de l'argent à travers les places financières de la planète. Je vous disais que je ne comprenais rien aux termes employés par les traders mais là j'ai tout compris, c'est très bien expliqué et nous sommes entraînés dans ce monde parce qu'il nous raconte des anecdotes, des vies bouleversés par l'appât du gain, l'évolution des pays qui se sont ouverts à l'argent. 
Le style est fluide, pas de mots compliqués pour une néophyte et quelle néophyte, une vraie !!

Nous passons de New-York à Marrakech, à Singapour, à Sydney, à Budapest après la chute du communisme, à Londres. Chaque chapitre est consacré à une ville et à ses traders qui finissent par s'isoler complètement de la vraie vie, boivent beaucoup, ne dorment plus et qui un jour se retrouvent sur le carreau parce qu'ils ne sont plus rentables.
Certains d'entre eux se retrouveront tout en haut de la hiérarchie avec jaguar, rolex, appartement dans les plus beaux quartiers et après....Après, ils se posent presque tous la question : "Cela sert à quoi tout ça". Leur femme est souvent partie, ils ne voient pas leurs enfants, ils se retrouvent seuls.
Trevor dira avant d'aller bosser "Encore une putain de belle journée au paradis", pour lui c'est devenu l'enfer. Est-ce que ses aspirations lorsqu'il était plus jeune étaient celles qu'il était en train de vivre ?

J'ai aussi appris que n'importe qui pouvait être trader, une voix puissante, une bonne analyse, être ambitieux, aimer l'argent, avoir le feeling, pas d'états d'âme.

- Tu as vu Wall street, le film d'Oliver Stone ? m'a-t-il soudain demandé.
-Oui.
-J'ai beaucoup aimé, beaucoup. Surtout le milieu qu'il décrit, celui des...golden boys, ceux à qui tout réussit.
-Mais...Stone les dépeint comme une bande de salauds, pourtant.
-Exactement ! Le message du film est très clair : si on veut bosser dans le secteur financier, on doit être un salaud.

Une autre phrase de ce livre "Je me suis dit que les idéalistes, les plus pathétiques sont certainement ceux qui n'ont pas trouvé ce qu'ils voulaient idéaliser".

La plupart de ces traders quittent la finance et se retrouvent boulangers, marchands de vins, pépiniéristes.

-ça semble un peu régressif, après ce qu'ils ont connu, non ?
- Une fois qu'on a joué en première division "tout" ce qui vient après est une régression.

Réflexion personnelle "C'est pour ça qu'au scrabble, les joueurs qui atteignent le sommet s'arrêtent de jouer lorsqu'ils sont moins bons ?"  Fermons la parenthèse.

Nous ne pouvons pas nous empêcher de penser à Jérôme Kerviel qui lui aussi a fini par succomber à l'argent pour finalement dégringoler très bas. Etait-il complètement fautif ?

J'ai aimé parcourir la planète avec D.Kennedy, cela m'a conforté dans l'idée que l'argent ne doit pas tenir une place centrale dans notre vie, le bonheur n'est pas dans un relevé bancaire à dix chiffres (j'écris un nombre à dix chiffres pour voir si cela fait beaucoup !), on peut être heureux avec beaucoup moins,  J'ai aimé ses pointes d'humour, son oeil exercé qui observe. Je ne peux pas dire que je ne pouvais pas lâcher le livre, ce serait mentir, il doit se lire par chapitre, ce n'est pas un vrai roman. Bonne lecture.  Bye MClaire.