jeudi 9 janvier 2020
Karine Tuil "Les choses humaines."
Je ne suis jamais déçue par le Goncourt des lycéens, c'est encore le cas. Ce livre, je n'ai pas envie d'employer le mot "roman", ce livre peut vous scotcher dans votre canapé pendant des heures, vous lisez et vous lisez encore jusqu'à la dernière page "C'était dans l'ordre des choses. On naissait, on mourait ; entre les deux, avec un peu de chance, on aimait, on était aimé, cela ne durait pas, tôt ou tard, on finissait par être remplacé. Il n'y avait pas à se révolter, c'était le cours invariable des choses humaines."
C'est surtout ce qui se passe dans le milieu décrit par Karine Tuil, ce milieu où les tentations sont multiples, où les gens sont soumis à une pression telle qu'ils en perdent le sens de ce qui fait une vie normale, ils n'aiment pas, ils baisent (excuses pour le mot mais c'est le seul qui convient) ils changent de partenaire et il arrive que le viol fasse partie de leur pouvoir..
"Jean et Claire Farel forment un couple de pouvoir".
Lui est journaliste politique, il est célèbre, l'audience est là. Claire est essayiste. Jean a une maîtresse journaliste, elle vit cette relation dans l'ombre, ne demande rien. Jean vit dans l'apparence. Claire fait une rencontre dans le cadre de son travail, un professeur de français dans une école juive du 93. Il a deux filles, pratique la religion juive, respecte la Torah, le mariage reste un acte sacré. Adam Wizman verra sa vie bouleversée, lui qui avait entendu cette phrase pendant son adolescence, si souvent répétée "En tant que JUIF, tu as des devoirs, tu fais partie d'un PEUPLE dont tu dois assurer la SURVIE" lui devra annoncer à sa femme qu'il la quitte pour vivre une histoire d'amour, une grande histoire d'amour, loin de la placidité conjugale.
Claire n'aura qu'à poser un mot sur la table "C'est fini."
Jean acceptera.
Jean et Claire ont un fils en commun Alexandre, brillant étudiant à Stanford, pas très bien dans sa peau, des parents absents, la pression des études, il doit être le meilleur et c'est de lui que viendra le bouleversement dans leurs vies. Un soir, il viole ou il ne viole pas, y a t-il eu un consentement ?
Vous lirez le bouquin...
J'ai aimé la description du milieu des médias, ce milieu où la vedette de la chaîne est épiée, j'ai trouvé quelques exemples de longévité qui agacent, cette soif de pouvoir, inutile de chercher longtemps, des noms arrivent très vite.
Ils vivent dans une angoisse permanente.
La dernière partie du livre est entièrement consacrée au procès, les Assises, là où tout est exposé avec des mots assez crus. Une maman qui ne veut pas admettre la culpabilité de son enfant.
J'ai essayé de me positionner dans ce procès, si j'avais fait partie du jury aurais-je pu désigner Alexandre coupable ? Comment avoir son libre arbitre face aux tweets assassins, aux réseaux sociaux ? Tellement difficile de faire preuve de discernement.
Il y a quelques dizaines d'années les femmes de mon âge ont peut-être été confrontées à du harcèlement, je dis peut-être parce que nous ne nous rendions pas compte que la petite phrase, le geste étaient du harcèlement, nous étions draguées sans suite..Les relations n'étaient pas les mêmes.
"La déflagration extrême, la combustion définitive, c'était le sexe, rien d'autre - fin de la mystification..."
Alors heureuse d'avoir connu une vie où les choses humaines étaient vraiment humaines..D'avoir connu une vie sans violence, des vrais rapports sociaux sans l'influence des réseaux sociaux.
J'oubliais les instants de tendresse qui nous font apprécier Jean, les instants qu'il donne à Françoise, à sa vieille maîtresse qui perd la mémoire..
J'ai aimé lire ce bouquin, je vous le recommande même si je ne suis pas certaine qu'il laissera des traces dans ma mémoire pendant des années. Il est dans l'air du temps.
J'avais lu deux livres de Karine Tuil.
https://gazettemarieclaire.blogspot.com/2016/12/avec-le-mensonge-on-peut-aller-tres.html
Bye MClaire.