mercredi 14 mars 2012

Dimanche dernier je voulais rentrer tôt chez moi après avoir joué la phase 3, je ne voulais pas manquer le documentaire sur la guerre d'Algérie, j'ai vu. J'ai vu les horreurs commises dans chaque camp. J'étais jeune, insouciante à cette époque, en regardant ce film, je me suis rendue compte combien cette guerre avait été meurtrière, violente, bien au delà de ce que je savais: Dans le journal chaque jour, il y avait les attentats, les assassinats commis contre les français, mais est-ce que la presse faisait état des centaines de morts dans le camp arabe? Je ne crois pas ou je ne m'en souviens pas..
Ce qui m'a interpellée, c'est que finalement nous nous étions très bien habitués à la guerre, nous vivions, nous riions, nous dansions, alors qu'à chaque instant nous risquions de mourir.

Pourquoi faut-il qu'un peuple asservisse l'autre qui est là sur sa terre? Je pense que la communauté française ne se rendait pas compte qu'elle laissait à l'écart une jeunesse qui un jour se léverait et se révolterait. Nous vivions ces années certains que nous avions raison, sûrs de nos droits. Nous avions rendu cette terre prospère, des vignes, des céréales, nous pensions qu'elle resterait éternellement la nôtre.
Tout aurait pu être différent, si nos dirigeants avaient su anticiper, cette haine qui avait envahi les uns et les autres n'aurait pas existée, nous serions certainement partis mais dans d'autres conditions. Que de vies auraient été épargnées, tous ces jeunes ne seraient pas morts pour rien.
Tôt ou tard, le peuple se révolte, nous en avons l'exemple aujourd'hui.
Je raisonne de cette façon parce que j'étais jeune lorsque nous avons tout laissé derrière nous, je n'avais rien construit, au contraire j'étais contente de découvrir un autre pays, vivre autre chose, vivre à Paris. J'ai réalisé un peu plus tard combien cela avait été terrible pour ma famille, je revois mon arrière grand-mère assise dans un fauteuil dans un HLM de Pontoise, entourée de ses filles, elles qui n'avaient connu que le soleil, ne comprenant toujours pas ce qu'elles faisaient là je suis presque certaine qu'elles avaient encore une lueur d' espoir, retourner là-bas lorsque ce serait possible.En plus le premier hiver passé en France avait été glacial et long, long, il n'avait pas été question de pique-nique à Pâques. Il fallait admettre que plus rien ne serait pareil.

En Algérie, Il y avait l'école obligatoire pour tous, oui mais tout allait très bien en primaire, les arabes étaient nombreux dans ces classes, et au fur et à mesure que l'âge avancait, au lycée, il y avait très peu d'éléves arabes, du moins chez les filles, un peu plus au lycée des garçons. Les filles restaient chez elles, les parents les mariaient très jeunes, elles se voilaient, aucun avenir pour elles.
Il ne faut pas instruire, c'est dangereux, on risquerait de se poser des questions et savoir y répondre. Ceci est vrai dans tous les pays où les hommes oppriment le peuple et surtout les femmes. Les plus pauvres rejoignaient les douars, habitaient dans des mechtas, là tout près de nous, mais toujours cachés, les autres vivaient dans les villages ou dans les villes, dans des cours communes où elles cancanaient toute la journée.
J'étais vraiment émue et révoltée en voyant ces femmes dans les mechtas avec leurs enfants magnifiques aux yeux immenses qui regardaient terrorisés et sans comprendre l'armée française abattre devant eux le père de famille, le frère qui ne voulaient pas parler et qui sans doute ne savaient rien.
J'étais bouleversée en voyant des français égorgés, mutilés, des jeunes gens joyeux qui mouraient dans un milkbar ou dans un casino parce que des bombes avaient été posées là par des femmes, une femme ne doit pas donner la mort elle qui donne la vie, mais la période faisait que plus rien ne semblait interdit en matière de violence. Elles pensaient à quoi ces femmes lorsqu'elles déposaient leur panier meurtrier sous un siège? Je ne peux pas imaginer qu'elles se réjouissaient en voyant les photos terribles sur le journal le lendemain, la guerre est un nom féminin, c'est étrange, une bataille, une guerre, une guerilla, une révolte, que des noms féminins. Je savais tout ce qui a été montré, je reconnaissais les documents, mais j'avais un peu oublié la violence de la réalité.
J'avais aussi oublié le bruit des youyous qui ponctuait les révoltes.
Nous habitions tout près de la caserne, là où Christian faisait son service militaire, à l'Intendance, il ne voyait rien mais il entendait les hurlements de douleur venant des bâtiments voisins,  nous entendions des cris, . On torturait là tout près, nous ne le savions pas. La torture en Algérie a été longtemps niée.

Quelle tristesse en voyant ces bateaux pleins de familles modestes qui partaient vers une patrie que la plupart d'entre eux ne connaissaient pas, les regards embués de larmes qui regardaient la côte s'estomper puis disparaître complètement, je pense à mes parents qui étaient sur un de ces bateaux, mon père avait réussi à embarquer sa voiture chérie, une dauphine verte, son seul bien qu'il a pu sauver avec une malle remplie d'objets inutiles, ils avaient oublié d'y mettre leurs photos.Nous sommes partis avec notre bébé un mois après eux, par avion. Personnellement j'étais venue en vacances en France deux fois, une fois avec mes parents, une fois en voyage de noces, ce n'était pas tout à fait l'inconnu, et nous savions où poser nos bagages, chez mes beaux-parents à Aix.
Lorsque nous sommes à Argelès-sur-Mer, nous nous asseyons au bord de la plage et je regarde au loin en disant à Christian " Je suis née là-bas et je ne reverrai sans doute jamais cet endroit, pourtant ce n'est pas si loin."

Ce documentaire était extrêmement bien fait, sans parti pris, il montrait juste la vérité.

Comme par hasard ou peut-être pas, ce matin en rangeant des livres, je suis tombée sur un livre que maman m'avait donné "La terre de Berrouaghia" de Pierre Picquart et Garnier-Grizot, deux habitants de cette petite ville où je suis née. Pierre Picquart est l'enfant de la quatrième génération de sa parenté ayant passionnément adopté l'Algérie. Je l'ai feuilleté, reconnu des noms si souvent entendus, je vais sans doute le relire. Un très joli passage à la fin du livre :
"L'homme n'est ni bête, ni ange, affirmait Pascal, voici plus de trois cents ans. Cela est vrai sous la réserve que beaucoup de gens tendent à se rapprocher de l'un ou de l'autre. Se rapprochent de la bête ceux qu'aucun idéal n'émeut et ne meut : De quel poids ils pèsent sur les autres ! Leur appètit de jouissance ne se contient que par la crainte ou la force : aux autres ils donnent le devoir de leur procurer un idéal, sans qu'il leur soit permis de désespèrer de leurs efforts."

Aprés cette gazette, je ne savais pas si j'avais très envie de mettre des dessins, mais finalement pourquoi pas :




Les gens modestes risquent l'expulsion, pas d'inquiètude pour eux, deux maisonnettes les attendent dans le 16ème et au Cap-Nègre, ils seront beaucoup mieux installés que dans un carton sur une grille de métro.









Un qui reprèsente François Hollande, c'est marrant.










Un qui représente Marine Le Pen qui nous a refait le coup de son papa, nous étions fous d'inquiètude pour elle, nous voilà soulagés.












Fukushima, là je n'ai pas envie de rire, mais le dessin est très parlant.
 Bye MClaire.