vendredi 23 janvier 2015

"Peine perdue" Olivier Adam.



Je l'ai terminé et je suis triste. Je n'avais pas envie de le finir, je lisais doucement, chapitre après chapitre, je le posais, le reprenais, j'avais souvent les yeux humides, il fallait sans doute que je digère chaque chapitre du livre, on ne peut pas le lire comme un roman d'amour, d'un trait..
Il m'énerve Olivier Adam, pas parce que je ne l'aime pas, bien au contraire, il a trop de talent à rendre jalouse une blogueuse qui écrit comme elle parle et qui écrit tout ce qui lui passe par la tête. Lui a une tête bien faîte mais pleine d'idées noires dans ses romans, lire Olivier Adam n'est pas une garantie de gaieté, même pas du tout, ces romans sont toujours très en phase avec la réalité de la vie et la vie n'est pas toujours gaie en ce moment pour une grande majorité des gens, vous savez bien que 1% de la planète est plus riche que les 99% restants.
Olivier Adam s'intéresse dans ce livre à ceux que la société actuelle broie,  il s'adresse aux invisibles, ceux qui rasent les murs pour se fondre dans la masse, les chômeurs, les pauvres, les enfants qui sont élevés par un seul parent parce que l'autre est parti, la cellule familiale qui se fissure. Un petit garçon qui attend son père le week-end, ce père qui est Antoine et qui ne viendra pas un jour, l'enfant ne parlera plus jusqu'à ce qu'il sache ce qu'est devenu son père.
La famille est un sujet récurrent dans les romans d'Olivier Adam.
Ceux qui pètent les plombs parce que leur vie ne leur convient pas, ce n'est pas la vie dont ils rêvaient, celle qui rêve d'être un jour une "nouvelle star". 
Un couple fusionnel à la retraite et Hélène tombe malade, il ne supporte pas de la voir doucement partir, il ne supporte pas de se voir vieillir, tout se bloque, se grippe, le corps, l'esprit, il s'enfonce avec une certaine délectation dans la vieillesse, il ne lutte pas, il surjoue sa vieillesse, ne conduit plus, ne veut plus voyager, il érige sa vieillesse autour de lui comme un rempart. Pour moi, c'est un des plus beaux chapitres, les mots sont justes mais nous sommes aux antipodes de ce couple, l'âge, ah! l'âge, c'est quoi l'âge?

Il y a aussi Léa, cette jeune fille élevée dans un milieu aisé mais qui n'aime pas sa vie entre ses parents trop bourgeois, trop traditionnels, elle disparaîtra après avoir trop aimé un jeune homme perdu, drogué...Une jeunesse en désarroi.

Le livre est fait d'une vingtaine de personnages, un chapitre pour chacun mais il y a un lien Antoine un paumé divorcé qui adore son gamin et qui aurait pu avoir une carrière formidable dans le foot, il joue dans l'équipe locale, trop instable, trop colérique, aucun club de prestige ne veut le mettre sous contrat malgré son talent indiscutable. Il y a le coach Eric et le patron mafieux du club Pérez, il possède des hôtels, le casino, des restaurants, un yacht, il peut faire penser à certains patrons des clubs de foot.
Antoine si attachant, même pour les lecteurs, on voudrait qu'il ne lui arrive que de bonnes choses à Antoine. Il a perdu sa mère et ne s'en remet pas, c'était le pilier de la famille. Il a eu un môme et ne peut pas vivre avec lui, l'enfant vit avec sa mère, elle est gentille Marion, mais elle ne pouvait plus supporter l'instabilité d'Antoine, elle a mis Nino à l'abri dans le couple qu'elle forme maintenant avec Marco, un couple trop raisonnable mais qui rassure la jeune femme, toujours un peu amoureuse d'Antoine, c'est compliqué tout ça.

La vie des personnages se déroule dans un coin de la Côte d'Azur, là où les villas des riches perchées sur les hauteurs dominent les H.L.M, la misère.  Quel contraste ! Tout est trouble dans cette région malgré le ciel bleu limpide.

Vous avez compris, j'ai beaucoup aimé ce nouveau roman d'Olivier Adam, je pense avoir tout lu de cet auteur : 
"Il cite l'ex-ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, qui demandait, après avoir démissionné de son poste, fin août: «Doit-on s'excuser d'être à gauche? Qui portera la voix des démunis si on ne le fait pas?»
«Je me pose la même question pour le roman, dit Olivier Adam. Si la littérature ne fait pas ce récit, qui le fera?»

Il a raison, il décrit très bien toutes les blessures des invisibles. Il m'a profondément touchée.

Bye MClaire.