vendredi 28 août 2015


J'ai aimé, beaucoup aimé, un livre jubilatoire, une histoire vraie ou un peu inventée, difficile de savoir. 
Daniel Picouly est un vrai raconteur d'histoires, un talent fou pour nous captiver.
Nous l'avons vu cette année au salon du livre de Vannes, il présentait son bouquin. Cet homme occupe l'espace, il est grand, souriant, charmeur, ouvre les bras, fait beaucoup de gestes et vous écoutez le sourire aux lèvres, les yeux écarquillés en attendant la chute.
Il nous racontait l'histoire incroyable de son grand-père né en Martinique en 1893, Jean Jules Joseph Picouly. Ce grand-père qui était considéré comme un héros de la guerre 14-18.
Un document usé était précieusement conservé sous une cloche de verre, preuve de l'héroïsme de Jean Jules Joseph, personne n'avait le droit d'y toucher. Paulette la mère de Daniel Picouly et épouse de Roger s'était faite la gardienne de ce trésor et se chargeait de faire perdurer l'histoire, elle en rajoutait à chaque récit, finalement le grand-père aurait pu gagner la guerre à lui tout seul.
Daniel Picouly nourrissait depuis longtemps un projet, raconter l'histoire de ce héros dans un livre. Il s'est mis au travail mais à un moment il lui fallait des détails, les historiens n'auraient pas pu admettre un détournement de l'histoire, il s'est adressé à une historienne via internet et la réponse brutale est tombée : son grand-père n'avait jamais fait la guerre, il avait été exempté du service militaire, la Martinique avait besoin de bras pour la canne à sucre, l'est de la France était occupé, les champs de betteraves saccagés, plus de sucre, la France comptait sur la Martinique pour l'approvisionner.
Le mythe s'écroulait, l'auteur n'avait plus qu'à abandonner l'écriture de ce roman puisque rien n'était vrai.
Il a donc cherché à connaître la véritable histoire de son grand-père et un autre roman est né. La seule vérité à la sauce Picouly.

Il faut aimer les sagas familiales, la verve, l'écriture haute en couleurs de l'auteur, écriture imagée, nous sommes en Martinique, on s'y croit, Rosalie la mère de Jean Jules est une véritable amazone, elle vit dans une case, dans un quartier occupé uniquement par des femmes, elle tuait les hommes au lit et elle les renvoyait sitôt l'acte fini, les enfants en Martinique ne savaient pas qui était le père. Rosalie au grand coeur adorait son fils,  ce fils qui adorait Shakespeare, la lecture mais aussi Aurore une blanche, fille d'un riche planteur, ils s'étaient élevés ensemble. Les deux enfants s'aimaient, un amour impossible, un "nègre" et une blanche, il ne fallait même pas y penser à cette époque.
Rosalie a eu peur, Jean Jules a la fièvre jaune :
"Ma mère n'a peur de rien. Jamais. Les bêtes, les hommes, les cyclones, les incendies, les sorciers et leurs créatures :
soucougnans, guiablesses, zombies, dorlis, elle s'en moque. Passez votre chemin ! Ma mère n'a peur de rien. Pas même du noir de la nuit : rien de rien ! Mais là, elle a peur.."
"Mais le loup du conte n'attendit pas la fin de l'histoire et se jeta sur moi. J'étais une toute petit chèvre, même pas blanche."  Jean Jules guérira, c'est là que l'iguane fait son entrée dans le roman.

Les pages qui décrivent l'explosion de la Montagne Pelée sont fabuleusement écrites, le volcan raconte, il fallait avoir cette idée, faire parler un volcan terrifiant.

Par quels concours de circonstances Jean Jules Joseph s'est retrouvé à Tarbes et a épousé Marie, vous le saurez en lisant le roman.
Jean Jules avait écrit un agenda secret, retrouvé par l'auteur, sa vie n'était pas celle qu'il pensait, un secret jaillira.

Je vous le recommande vivement, il est plein de tendresse, profondément humain, c'est presque un livre d'aventure, vrai pas vrai, allez savoir ! Tout est possible.


J'allais oublier de vous dire pourquoi "Le cri muet de l'iguane"
l'iguane a accompagné une partie de l'enfance de Jean Jules Joseph, un iguane ne crie pas, il est muet et il a eu une place importante dans la vie de ce grand-père,la main du destin.


J'étais vraiment heureuse de rencontrer cet auteur accessible qui sait nous embarquer dans ses histoires fantastiques. Bye MClaire.